La vie est un véritable cadeau. Malgré tout ce que peut en dire la science, elle reste tout autant enveloppée de mystères que la mort elle-même. À chaque naissance, un nouveau miracle s’est produit, une rencontre entre le mortel et l’éternel, une croisée de chemin entre l’humain et le divin. Qui sommes-nous ? D’où venons-nous ? Le bébé que je tiens dans mes mains peut-il seulement révéler ses secrets ? Comment pénétrer sa conscience pour aller à la rencontre de ce qu’est le miracle de la vie ?

Venue au monde
Même si tout le monde est au courant de la façon de procréer, l’essentiel du processus reste invisible pour les yeux. Les aspects matériels de la conception à la naissance ont été étudiés par toute sortes de disciplines, des arts visuels à la biologie. Mais que dire des aspects immatériels et spirituels ? Chaque culture a sa propre vision de la naissance, ses rites et coutumes et souvent lui accorde un caractère sacré.
D’un point de vue de la conscience, la venue au monde d’un nouvel être peut être perçue principalement de deux façons. Nous pouvons la considérer comme une création de novo, un événement ponctuel, ou alors comme un continuum, une réincarnation.
En occident, nous sommes plus habitués à un concept de création que de réincarnation. En suivant cette idée, l’embryon puis le foetus et finalement le bébé est une nouvelle création, une nouvelle page blanche sur laquelle s’écrit l’histoire de sa vie. Sa personnalité est le résultat de ses gènes et de son environnement dès ses premiers jours in utero. Et si on y ajoute une dimension immatérielle, une nouvelle âme ou conscience se crée avec ce nouveau corps. Selon le concept de la réincarnation, le nouveau corps sert de point d’amarrage pour une âme qui se réincarne. Dans ce cas, l’âme existait déjà et avait déjà vécu sur la Terre.
Création de novo ou réincarnation ?
Si nous explorons les différentes pistes données par les différentes phénomènes de la conscience, les religions et même les approches scientifiques examinant la question, est-il possible de tirer quelque conclusion ?
En ce qui concerne l’investigation scientifique et systématique de la réincarnation, il existe plusieurs groupes de recherche qui collectent et étudient des témoignages de personnes se souvenant d’une vie antérieure. Un des pionniers (en Occident) en la matière était le Dr. Ian Stevenson dont le travail a été repris par le Dr. Jim Tucker aux États-Unis. Près de cinquante ans de recherche ont permis de récolter de très nombreux rapports d’enfants partageant leurs souvenirs parfois très détaillés de leur précédente identité. Il y a par l’exemple le récit de James Leininger qui racontait sa vie précédente de pilote, en tant que James Huston, qui mourut durant la guerre au Japon en 1945. Ses récits surprenants ont pu être vérifiés grâce aux documents de l’armée qui confirmaient l’exactitude des informations fournies par l’enfant.
Du coté de la médiumnité, les informations obtenues par le biais de communication avec les esprits ne permettent pas de trancher la question de la réincarnation. En effet, si nous prenons ne serait-ce que quelques références connues comme les écrits d’Allan Kardec [b17], d’Andrew Jackson Davis [b4-b7] ou encore d’Arthur Findlay [b24], nous ne pouvons que constater que les esprits ne sont pas tous du même avis. Selon les communications de Kardec obtenues par différents médiums et communicateurs, la réincarnation serait un fait : « tous nous avons plusieurs existences. Ceux qui disent le contraire veulent vous maintenir dans l’ignorance où ils sont eux-mêmes ; c’est leur désir ». Selon Davis, même si la réincarnation n’est pas directement abordée, il mentionne que l’âme est façonnée par le corps et qu’elle suit une évolution à travers différentes sphères après la mort. Findlay, lui, rapporte une communication obtenue au travers du médium John C. Sloan qui suggère que la réincarnation est improbable.
Finalement, si nous nous penchons sur des témoignages de sortie hors du corps tels que celui d’Anne et Daniel Meurois-Givaudan [b25], nous observons que c’est le concept de réincarnation qui est clairement soutenu. Dans leur livre, ils suivent, par le biais de leurs sorties hors corps, le processus de réincarnation d’une âme tout au long de la grossesse jusqu’à la naissance.
En acceptant ces divers témoignages et récits comme un reflet de la réalité, il semble que la réincarnation soit une voie de développement de la conscience tout a fait possible même s’il n’est pas clair qu’elle soit l’unique voie empruntée par chacun de nous. Est-il donc possible d’exclure qu’un bébé soit doté d’une toute nouvelle conscience n’ayant pas eu de précédente expérience ? Les différentes sources ne semblant pas s’accorder entièrement, il ne serait pas raisonnable de penser qu’il n’y ait qu’une façon de voir une nouvelle vie éclore.
Destin et mission de vie
La réincarnation est une question épineuse mais une autre question qui y est rattachée l’est tout autant, c’est celle de la mission de vie. Dans ce contexte, le débat autour de notre libre arbitre est loin d’être clos. Lorsqu’un nouvel être naît, a-t-il déjà une mission, une oeuvre à accomplir en venant sur Terre ? Si oui, comment est-elle déterminée ? À quel point pouvons-nous la modifier en cours de route ? Si non, quel est le sens d’une vie ?
À la naissance d’un enfant, il se peut que rien ne soit écrit ou prédéterminé, que l’enfant jouisse de possibilités infinies de développement et que ni les grandes épreuves de sa vie, ni l’instant de sa mort ne soient définis. L’enfant naît peut-être sans bagages, si ce n’est l’influence de son environnement in utero et des chromosomes de ses parents, et sans plan divin d’avenir.
Néanmoins, lorsque nous faisons face à de grands défis ou lorsque notre vie se trouve parsemée d’heureuses coïncidences, il est légitime de se demander si cela était écrit. Comme discuté dans cet article , la vie nous réserve parfois de surprenantes situations, des dénouements inespérés et des difficultés qui bouleversent à jamais notre existence. C’est alors que nous nous mettons en quête de sens. Croire que notre vie comporte quelques éléments prédéfinis peut grandement nous aider à traverser les épreuves, à nous libérer de la culpabilité, de la tristesse et d’autres afflictions du coeur et de l’esprit. De la même manière, l’idée de réincarnation peut nous aider à donner un sens à la vie.
Mais c’est alors que nous pouvons nous demander si ces espoirs que la vie ait un sens et que nos souffrances ne soient pas uniquement vaines, aléatoires et injustes ne sont pas que le résultat de quelque biais cognitif. Par exemple, il existe le biais de la croyance en un monde juste, décrit à l’origine par le psychologue Melvin Lerner, qui nous mènent à réinterpréter les causes, les effets ou le comportement d’une personne souffrante de manière à ce que la personne mérite ce qui lui arrive. Ainsi, une personne atteinte du SIDA aura tendance à être dénigrée et blâmée pour son comportement, la rendant responsable de sa souffrance. Croire en la réincarnation justifierait également cette peine en postulant que cette maladie fait partie du chemin de vie de cette personne, qu’elle s’inscrit dans son karma.
Le libre arbitre à l’attaque du karma
Si nous admettons qu’à la naissance il existe déjà un plan divin* nous concernant, qu’il résulte de vies antérieures ou non, notre soif de liberté peut crier au désespoir. Où se trouve mon libre arbitre si tout est déjà planifié d’avance ? À quoi bon s’efforcer de bien se comporter, d’apprendre, de faire preuve de courage, de compassion, d’amour si le résultat sera le même ? Comment résoudre cette énigme ? John Stuart Mill peut venir à notre rescousse avec sa célèbre citation:
Notre liberté s’arrête là où commence celle des autres.
John Stuart Mill
Peut-être est-ce la clé. Un destin parsemé de point fixes, qui bouge selon la mise en oeuvre du libre arbitre de chacun. Au final, nous n’aurions qu’un plan dans nos mains qui ne dépende que de nous pour être exécuté ou modifié. Nous avons toujours le choix même si celui-ci semble restreint. Autrement dit, nous sommes peut-être en possession de notre futur comme si nous détenions de la pâte à modeler. Nous aurions entre nos mains des matières premières prédéterminées par un plan divin mais notre libre arbitre nous permettrait de les modeler selon notre propre volonté. Nous jouirions donc d’une grande liberté (je décide ce que je fais de ma pâte à modeler) mais qui serait limitée par des contraintes prédéterminées de notre destin ou karma (la vie ne m’a donné que peu de pâte) et le libre arbitre des autres (quelqu’un peut décider de voler mes créations).

Un chemin de transformation
Il est une seule certitude lorsque nous naissons, c’est celle que nous allons mourir un jour. Ce qui se passe avant, entre-deux et après ne sont que timides spéculations qui s’inspirent beaucoup des phénomènes de la conscience. La science telle que nous la connaissons aujourd’hui n’est que peu apte à nous fournir des réponses à propos de ce qu’est réellement la Vie. Les témoignages à travers les âges et les géographies d’expériences de mort provisoire, de médiumnité, de sortie hors corps et autres semblent indiquer que notre venue sur Terre n’est de loin pas un simple hasard ni le résultat d’un savant mélange de matière.
Le miracle de la vie, c’est certainement de donner la possibilité à une âme de se transformer, d’expérimenter, peu importe que nous croyions ou non en la réincarnation. Finalement, rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme suggérait Antoine Lavoisier. Cette formule contient peut-être une vérité qui ne s’applique pas uniquement à la matière mais à bien plus encore, qui sait ?
*à défaut de trouver une meilleure terminologie, j’utilise ici le mot « divin » pour décrire un plan qui est déterminé à un niveau qui dépasse notre entendement humain.
Lectures pour aller un peu plus loin :
Si ce thème vous intéresse, il existe de nombreuses lectures pour approfondir le sujet. En voici, une petite sélection de sources en plus de celles citées dans le texte:
- [b1] DÉTHIOLLAZ, Sylvie, FOURRIER, Claude Charles, Voyages aux confins de la conscience
- [b9] BRUNE, François, Les morts nous parlent
- [b22] TUCKER, Jim B., Return to Life
- [b19] DALAI LAMA XIV et al., Sleeping, dreaming, and dying
- [b26] KEAN Leslie, Surviving Death